Alors que l’on ne parle plus que de vaccin contre le Covid-19, la guerre entre laboratoires bat son plein, prenons le temps d’effectuer un retour sur l’épidémie foudroyante de méningite cérébro-spinale qui, en 1974, flambe au Brésil. Coup de chance, en France, l’institut Mérieux vient de développer un vaccin anti-méningite. Un pont aérien s’instaure alors entre La France et le Brésil pour acheminer les doses de vaccins produits nuit et jour par Mérieux.

Résultat : en 5 jours, 10 millions de personnes sont vaccinés à Sao Paulo vaccinés. En 6 mois, 90 millions de Brésiliens sont protégés.

C’était il y a 45 ans…

Cette histoire va révéler que le principal défi en terme de vaccination de masse est la coordination et la logistique. C’est de cette expérience que le docteur Charles Mérieux créera 10 ans plus tard la Bioforce, première école au monde de logistique humanitaire.

Il y a 10 ans exactement, j’avais interviewé Claude Lardy, l’une des plus proches collaboratrices de Charles Mérieux.

Retour sur le Brésil de 1974.

En 1974, une épidémie foudroyante de méningite cérébrospinale frappe le Brésil. 4000 morts à São Paulo en quelques jours. Etrangement, la souche est de type A, de type africain. Elle est bien connue d’un médecin militaire français, grand épidémiologiste, coureur de brousse et pourfendeur de bureaucrates, Léon Lapeyssonnie (1915-2001). Fervent adepte du docteur Eugène Jamot (1876-1937), médecin colonial, vainqueur de la maladie du sommeil (Trypanosomiase) en Afrique Occidentale, Lapeyssonnie consacrera sa vie à la lutte contre la méningite, le choléra et la « trypano ».

Lapeyssonnie et Mérieux pour les « campagnes coup de poing »

C’est lui, Lapeyssonnie, qui, en 1963, décrira scientifiquement sur le terrain : la « ceinture de la méningite en Afrique».

A Lyon, le médecin pasteurien et industriel français, Charles Mérieux (1907-2001) se laisse convaincre par Lapeyssonnie de la nécessité de créer un vaccin. En quelques années, c’est chose faite. Les flambées épidémiques commencent à être circonscrites, particulièrement celles en lien avec les traditionnelles périodes de pèlerinages vers La Mecque. C’est dans ce contexte que surgit en 1974 au Brésil une épidémie de méningite de souche africaine.

90 millions de Brésiliens en six mois !

Seul l’Institut Mérieux dispose du vaccin, inventé quelques années auparavant pour protéger les populations vivant dans la « ceinture Lapeyssonnie ». Mérieux décide alors de consacrer tous ses moyens de production de Marcy l’Etoile près de Lyon à la fabrication du vaccin. Ceux-ci fonctionneront jour et nuit. Un pont aérien est établi entre Lyon et les différentes villes brésiliennes. Aux autorités sanitaires du pays d’assurer la vaccination de toute la population, jusque sur les trottoirs s’il le faut grâce au Pedojet, pistolet hydraulique injecteur sans aiguille américain (*).

Dix millions d’habitants de São Paulo sont vaccinés en cinq jours, 90 millions de Brésiliens en six mois ! L’épidémie est cassée.

L’expérience du Brésil – frapper vite et fort avec une organisation du travail sans faille – fut transformée par les pionniers de labo et de terrain que furent le docteur Mérieux et le professeur Lapeyssonnie. Ceci aboutira 10 ans plus tard, en 1984, à la création de la première école de logistique humanitaire, Bioforce.

(*) A l’issue de l’expérience du Brésil, Lapeyssonnie travaillera à l’amélioration du pistolet injecteur sans aiguille américain, Pedojet (fragile et nécessitant une maintenance complexe). Ainsi naquit l’Imojet (moins de pièces et plus solide) qui fut utilisé dans certains « programmes élargis » de vaccination, type coup de poing.