Hormis les portraits de ses fondateurs, il n’existe pas de photo de la création du CICR en 1863. Il faudra attendre 1870 et la guerre franco-prussienne suivie de la Commune de Paris l’année suivante pour voir apparaître les premières photos « Croix-Rouge ».

Au début des années 1870, les procédés d’impression des journaux ne permettent pas encore la reproduction photographique. Les rares « photos » publiées sont en fait l’œuvre de graveurs interprétant des clichés. Les journaux, pourtant friands d’images, font alors appel à une multitude d’illustrateurs et dessinateurs de presse. L’impossibilité technique de reproduire de la photo dans les journaux explique pourquoi les premiers photoreportages ne furent diffusés que bien des années après qu’ils aient été réalisés.

Guerre franco-prussienne, deux clichés

La probable plus ancienne a été prise à l’automne de 1870. L’Empire français vient de se prendre une déculottée. Napoléon III et son armée sont capturés le 2 septembre par les Prussiens. L’Empire s’effondre et la République est proclamée deux jours plus tard, le fameux 4 septembre.

Guerre franco-prussienne 1870-1871. Metz. Ambulance belge dirigée par le Dr Félix Eloin.

Ce premier cliché montre l’ambulance belge du docteur Félix Edouin à Metz, peut-être après le siège mémorable. Le médecin est probablement l’homme debout portant le brassard Croix-Rouge. L’auteur reste anonyme.

Le deuxième cliché est suisse. Des Français internés à Lausanne. Il s’agit de l’armée exsangue du Général français Charles-Denis Bourbaki. La composition est picturale. Personne ne bouge, le petit oiseau va sortir (très lentement) car on imagine les contingences techniques de réalisation.

L'une des premières photos de la Croix-Rouge en opération : l'accueil en Suisse d'internés et de blessés de l'armée du Général Bourbaki après la défaite française de Sedan et la capture de l'Empereur Napoléon en septembre 1870.

L’œuvre est probablement du genevois Henri-Antoine Boissonnas, dont le fils, Frédéric, photographe lui aussi, connaîtra une certaine notoriété en Suisse.

Commune de Paris, deux clichés

Ce troisième cliché montre une ambulance de la Croix-Rouge armée de nombreux volontaires et bien équipée. Il y a même un curé ! Franck signe ce cliché. Derrière ce pseudonyme, il y a François Gobinot de Villecholle (1816–1906), l’un des grands photographes de la Commune de Paris.

Voici enfin la quatrième, la plus extraordinaire peut-être. L’auteur est anonyme. Des soldats versaillais au repos devant l’église Saint-Jean de Belleville (pendant la semaine sanglante ?). En arrière-plan, une ambulance hippomobile. On y distingue une croix rouge sur fond blanc avec, dessous, une inscription. Peut-être « ambulance de la Croix-Rouge »…

Elle pourrait avoir été prise par Bruno Braquehais, auteur d’un extraordinaire travail préfigurant le photojournalisme. Sourd-muet de naissance, originaire de Dieppe, c’est lui qui a livré un travail sur le vif saisissant de la mise à bas de la colonne de Vendôme le 16 mai 1871 ordonnée par le grand maître de la peinture et vieil anarchiste, Gustave Courbet !