Derrière l’acronyme froid de « RLF » se trouve, en réalité, un service essentiel à toutes les personnes qui perdent la trace d’un proche dans le cadre de conflits, de catastrophes naturelles ou de la migration. Le CICR et les Croix-Rouge et Croissant-Rouge nationaux travaillent main dans la main à travers le monde pour tenter d’élucider le sort des personnes portées disparues, échanger des messages familiaux et réunir des familles. Retour sur ces trois missions :

Elucider le sort des personnes portées disparues

Dans les conflits armés et autres situations de violence, lors de catastrophes naturelles ou de migrations, nombre de personnes disparaissent. Beaucoup d’entre elles ne réapparaissent jamais et demeurent introuvables longtemps après que les armes se soient tues et que le processus de reconstruction se soit mis en marche.

Craignant le pire mais continuant à espérer envers et contre tout, les familles ne sont pas en mesure de faire leur deuil et de clore ce chapitre douloureux de leur existence. Souvent, de graves difficultés d’ordre économique et social viennent s’ajouter à la souffrance psychologique des familles. Les disparitions ouvrent aussi des plaies rongées par le soupçon et les malentendus, qui mettent à mal les relations humaines et communautaires – parfois durant des années voire des décennies.

Le CICR joue un rôle important pour attirer l’attention sur les diverses problématiques liées aux personnes portées disparues, offrir des conseils et, par le biais de la formation, contribuer au renforcement des capacités. Le CICR peut aussi fournir une assistance directe aux familles ou faciliter le dialogue entre les autorités et les associations de familles. Quand les autorités sont dans l’impossibilité d’agir, le CICR peut mobiliser d’autres prestataires de services et d’autres acteurs clés, et même, se substituer temporairement à des autorités défaillantes.

En 2018, les équipes du CICR sont allées dans le Guidimakha (Mauritanie) pour rencontrer des familles de disparus à la suite d’un naufrage en Méditerranée. Le CICR a collecté des informations sur les disparus et des échantillons d’ADN de leurs proches. « Seul un recoupement entre les informations collectées sur les corps et celles données par les familles peut permettre l’identification des personnes décédées » explique José-Pablo Baraybar, anthropologue-légiste au CICR. « Dans le cas de ce naufrage, l’ADN est une donnée essentielle pour parvenir à mettre un nom sur des corps et apporter une réponse à des familles. »

Echanger des messages familiaux

Pour les personnes séparées des membres de leur famille, lorsqu’aucun moyen de communication n’est possible, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge s’emploie à rétablir le contact, à travers les Messages Croix-Rouge (MCR) ou bien encore les Salamat.

Le MCR (encore un acronyme froid mais hautement utile) est aujourd’hui le principal moyen utilisé pour la transmission de nouvelles à caractère privé et familial, entre des personnes séparées par un conflit armé (parce que déplacées, réfugiées ou encore détenues). Une procédure identique s’applique aux victimes des catastrophes naturelles.

En 2018, par exemple, 147 488 MCR ont été récoltés et 137 210 autres distribués. En détention, 29 574 ont été récoltés et 13 499 réponses distribuées. Le MCR est souvent pour les détenus le seul lien, ténu, avec le monde extérieur.

Si la distribution des MCR reste relativement stable d’année en année, le boom technologique de la téléphonie a vu l’apparition d’un nouveau type de message : les Salamat. Objectif : offrir quelques minutes de conversations pour remplacer la rédaction des messages. En 2017, le CICR affichait environ 500 000 Salamat, l’année suivante, 1 million.

Au Nicaragua, Fatima et sa fille (qui s’appelle également Fatima) vivaient avec l’angoisse de ne pas savoir si le père de famille est toujours en vie. Pendant huit années, elles ont attendu un signe de celui qui est davantage associé à l’absence, qu’au bonheur des moments familiaux partagés. Un jour, elles découvrent que s’il ne les contacte pas, c’est parce qu’il est détenu dans une prison panaméenne. C’est alors que le CICR entre en jeu avec un MCR…

Rechercher les membres d’une même famille séparés

Par ailleurs, partout où cela est possible, le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge recherche et réunit (si possible) physiquement ou virtuellement des familles séparées par les conflits, migrations ou catastrophes naturelles. Cette mission laisse place à des histoires de retrouvailles mémorables, comme celles d’ Eliane au Rwanda, avec sa famille dont elle n’avait plus de nouvelles depuis 24 ans

En Europe, pour répondre aux disparitions dans le contexte de la migration vers le Vieux continent, a été créé un outil en ligne « Trace the Face ». Dans ce contexte, le réseau de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge est actuellement à la recherche de 24 500 personnes portées disparues, signalées par leur famille. Ce service en ligne, totalement gratuit, permet à des proches qui recherchent d’autres proches disparus, de publier leur photo en ligne avec un message disant « je cherche mon frère » par exemple. Sur la plateforme Trace the Face, toutes les coordonnées des Croix-Rouge et des Croissant-Rouge sont également disponibles. Contacter le bureau de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge le plus proche de chez soi est la première étape pour tenter de retrouver un proche disparu. Depuis sa création, Trace the Face a permis à 245 familles de se retrouver.

Lorsque Faridun et sa famille ont dû fuir l’Afghanistan, ils n’auraient jamais cru se retrouver séparés pendant 4 ans. Jusqu’à ce qu’un jour, en 2020, un des fils de Faridun pousse la porte d’un bureau de la Croix-Rouge britannique dédié à la recherche de personnes portées disparues. La famille est en fait dispersée à travers le Royaume-Uni et c’est grâce à Trace the Face qu’elle sera enfin réunie.