Traversées de la Manche : la Croix-Rouge française et la Croix-Rouge britannique appellent à une plus grande collaboration internationale pour protéger les personnes sur le chemin de l’exil

Le week-end dernier, à l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, la Croix-Rouge française et la Croix-Rouge britannique se sont unies pour appeler à davantage de compréhension et de compassion à l’égard des réfugiés. Les deux organisations souhaitent rappeler les périples désespérés qu’entreprennent souvent les personnes cherchant à se mettre à l’abri au Royaume-Uni. Elles appellent conjointement les gouvernements à collaborer afin d’assurer aux personnes l’accès à une protection et la prise en charge de leurs besoins humanitaires, indépendamment de l’itinéraire qu’elles ont emprunté.

Les Croix-Rouge française et britannique, qui viennent quotidiennement en aide aux réfugiés et aux demandeurs d’asile à la frontière franco-britannique, considèrent que les voyages périlleux et désespérés que doivent entreprendre femmes, enfants et familles après avoir été forcés de fuir leur pays d’origine sont très méconnus.

D’après des entretiens sur le terrain* menés par la Croix-Rouge française auprès de plus de 80 personnes vivant dans des camps de fortune aux environs de Calais et de Dunkerque, en moyenne, ceux-ci avaient dû quitter leur domicile depuis plus de quatre ans (49 mois).

D’après cette enquête, la quasi-totalité des personnes interrogées ont fui des pays reconnus comme étant en proie aux conflits. Elles ont indiqué vivre sur place depuis deux à six mois et avoir eu du mal, pendant cette période, à satisfaire leurs besoins essentiels, notamment en matière de nourriture, d’hygiène, d’eau potable et d’abri.

Ce constat est partagé par les populations vivant de part et d’autre de la Manche comme en témoigne un sondage réalisé par Opinion Way pour la Croix-Rouge française*. 55% des répondants du côté français et 48% du côté britannique considèrent que la situation s’est dégradée au cours des dernières années, et que cette dynamique pourrait s’amplifier dans le Calaisis et le Dunkerquois avec le Brexit (pour la moitié des répondants français). Pour cette raison, les riverains perçoivent la question migratoire comme l’un des 5 enjeux prioritaires auxquels leur territoire est confronté. Ils sont particulièrement heurtés par la détresse des enfants contraints de survivre dans des conditions inhumaines, les victimes de traite et les personnes décédées en mer.

Cet appel de la Croix-Rouge française et de la Croix-Rouge britannique est lancé alors que le Gouvernement britannique a fait part de son intention de procéder à une réforme du système national d’asile. Ces nouvelles mesures comprennent la mise en place de centres d’accueil et de visas de protection temporaire pour les personnes demandant l’asile après avoir traversé des pays tel que la France. Selon la Croix-Rouge britannique, ces modifications vont créer un système à deux vitesses, dans le cadre duquel le dossier d’une personne et l’aide dont elle bénéficie seront évalués à l’aune des moyens par lesquels elle est entrée sur le territoire, et non de son besoin de protection.

La Croix-Rouge britannique se dit préoccupée par cette réforme. Selon les deux organisations, il faudrait plutôt sécuriser les voies permettant de demander l’asile au Royaume-Uni renforcer l’aide humanitaire aux personnes qui ont été déplacées et vivent dans des camps de fortune. Cet accompagnement doit inclure une prise en charge psychosociale, l’accès aux soins, l’accès à l’information, la fourniture de vêtements et la possibilité de passer des appels téléphoniques.

* Cette enquête a été menée en juin 2020 à Calais et à Grande-Synthe par 2 équipes de 4 bénévoles et interprètes de la Croix-Rouge française, spécifiquement formées à l’administration des questionnaires, pendant 2 semaines. Les entretiens ont duré en moyenne entre 45 minutes et 1 heure. Ils ont été menés en tête-à-tête, à proximité du lieu de vie des migrants