En septembre 1944, alors que l’armée allemande se replie dans les dernières poches de résistance, l’île de Groix se retrouve piégée au cœur de la poche de Lorient, dans le sud de la Bretagne. Dans l’ombre des combats, une opération d’évacuation humanitaire conduite par la Croix-Rouge française permet à plus de 700 enfants de quitter l’île de Groix, assiégée et affamée.
Depuis août 1944, l’île de Groix, qui compte alors un peu plus de 4 400 habitants, vit sous la pression croissante de l’occupation allemande, alors que les troupes alliées progressent vers les ports stratégiques de l’Atlantique. Les forces occupantes monopolisent les ressources, les liaisons maritimes avec le continent sont presque inexistantes, et les bombardements américains visant les positions allemandes se multiplient. La population, privée de ravitaillement, se retrouve prise en étau.
Le 5 septembre 1944, la Croix-Rouge française mandate officiellement le bâteau à vapeur Île de Groix, navire de liaison de l’île, pour organiser une évacuation humanitaire d’enfants de moins de 16 ans et pour assurer le ravitaillement de la population civile. En accord avec les autorités, l’opération sera lancée à partir du 18 septembre 1944. Plus de 700 enfants accompagnés de quelques adultes embarquent à bord du navire. La traversée se fait dans le calme : les attaques aériennes sont suspendues et les troupes allemandes laissent passer le convoi. Pour la quasi-totalité de ces jeunes passagers, c’est la première fois qu’ils quittent leur île et qu’ils voient le continent.
À leur arrivée à Concarneau, des camions les conduisent vers le Centre-Bretagne, une zone libérée depuis début août. Ils sont répartis dans plusieurs communes : Uzel, Gausson, Plouguenast, Langast, Saint-Martin-des-Prés… Les habitants les accueillent avec une grande générosité, offrant à ces jeunes Groisillons un refuge chaleureux, loin des épreuves qu’ils viennent de traverser.

Guerre 1939-1945. Lorient. Bâteau de la Croix-Rouge française pour ravitailler la population de l’île de Groix.
Le rôle du CICR sur l’île de Groix en 1945
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) intervient quelques mois plus tard sur l’île de Groix, à l’occasion de son opération de secours dans les poches de l’Atlantique. Le 3 mars 1945, trois délégués du CICR se rendent sur place, et visitent les camps de prisonniers de guerre français et américains, et l’hôpital militaire allemand où sont soignés civils et soldats blessés. Dans leur rapport, ils dressent un état des lieux de la situation humanitaire sur l’île. Les ravitaillements alimentaires sont assurés de manière régulière grâce à un accord entre les belligérants et les distributions de vivres sont organisées par la mairie. Malgré un manque de médicaments, les maladies contagieuses sont en net recul. Les relations entre la population et les troupes allemandes restent, quant à elles, relativement stables. Il conclut que les besoins humanitaires immédiats sont couverts, tout en recommandant une surveillance régulière des distributions de vivres.
Après la Libération, le 8 mai 1945, la plupart des enfants regagnera l’île de Groix, retrouvant leur île marquée par la guerre, mais enrichis d’un lien durable avec leur famille d’accueil du continent.
Aujourd’hui, cette page d’histoire est à (re)découvrir dans l’exposition “Les enfants réfugiés de l’île de Groix”, présentée jusqu’au 2 novembre 2025 à l’Atelier-Musée du tissage à Uzel, l’un des villages qui les accueillit en 1944.

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