Depuis le 1er octobre, Mirjana Spoljaric occupe les fonctions de présidente du Comité international de la Croix-Rouge. Une première. En 160 ans d’existence, le siège n’avait été occupé que par des hommes. La voici depuis 3 mois au service de l’institution.
Le 15ème président est donc une femme, cooptée pour un mandat de quatre ans (renouvelable deux fois). 15 présidents en 160 ans… Le ratio donne une durée moyenne de 11 années par présidence. Moyenne dans laquelle, le général Dufour, premier président et ses quelques mois de mandat tempèrent les quarante six ans de règne de Gustave Moynier, suivis des dix huit autres accomplies par son neveu par alliance, Gustave Ador (de 1864 à 1928).
Présidente-diplomate humanitaire
Au-delà des aspects statutaires de la fonction au sein de la gouvernance, la présidente apparaît comme la première diplomate de l’institution, portant la voix des victimes des conflits mais aussi celle des Conventions de Genève et plus globalement du droit international humanitaire (DIH). La fonction est parfois le dernier recours, le plus haut échelon pouvant faciliter ou débloquer une situation opérationnelle dans laquelle d’autres efforts sont restés vains.
Un rang de cheffe d’Etat
De part le statut unique au monde du CICR (*), la présidente bénéficie d’un rang comparable à celui d’un chef d’Etat. Son influence peut permettre, par exemple, de faire aboutir des négociations pour entrer dans des prisons, de chercher l’appui de grande puissance pour convaincre un belligérant de mieux respecter l’espace humanitaire, tel que défini dans les Conventions de Genève. Pour mémoire, tous les Etats sont parties aux textes protégeant ceux qui ne se battent plus (combattants blessés ou capturés) et ceux qui ne se battent pas, les civils.
Intermédiaire neutre
Incarnant le rôle d’intermédiaire neutre du CICR, la présidente pourra, par exemple dans le cadre d’un conflit armé international, visiter au plus haut niveau les adversaires ; une façon de soutenir les opérations de protection et d’assistance sur le terrain conduites par le CICR. La mission sera de valoriser les obligations du droit international humanitaire auprès des belligérants mais également de tout autre Etat ou organisation pouvant avoir une influence sur le conflit.
Prendre la mesure de la tâche
A la tête de 20 000 collaborateurs travaillant dans plus de 80 pays, épaulée par un vice-président, une Assemblée, une direction et un siège sis depuis 160 ans à Genève, Mirjana Spoljaric prend la mesure de sa tâche :
« C’est avec fierté et humilité que j’endosse le rôle de présidente du Comité international de la Croix-Rouge. À un moment où de nouveaux conflits traînent en longueur et provoquent une tragédie aux conséquences incalculables et où le changement climatique frappe de plein fouet les plus vulnérables, l’action humanitaire du CICR et des partenaires du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge est plus nécessaire que jamais.
« Il n’est pas tolérable à mes yeux que des gens fuient le conflit la peur au ventre, souffrent de la faim ou soient en butte à la violence. Le président ou la présidente du CICR travaille pour ces populations et je m’engage à les représenter, à faire entendre leur voix et connaître leurs besoins à ceux qui ont le pouvoir d’agir. L’opinion peut se lasser mais le CICR doit s’employer à apporter assistance et protection aux populations aussi longtemps qu’elles en ont besoin et nous, nous devons compter, pour ce faire, sur le pouvoir de protection du droit international humanitaire et le promouvoir ».
(*) Le CICR, organisation neutre, impartiale et indépendante, bénéficie d’un statut unique au monde, sui generis comme disent les juristes. Organisation de droit privé, elle est la seule à disposer via les Conventions de Genève dont la Suisse est dépositaire, d’un mandat spécifique de protection et d’assistance des victimes des conflits armés. Le CICR se distingue ainsi de toutes les autres organisations humanitaires, que ce soient les sociétés nationales de Croix-Rouge ou de Croissant-Rouge, auxiliaires des pouvoirs publics, les ONG, nées de l’initiative privées ou encore les agences onusiennes gérées par une organisation politique, les Nations unies.
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