Actuellement à Paris, le Petit Palais accueille jusqu’au 27 août une remarquable exposition sur la tragédienne, peintre et sculptrice, la fantasque et géniale Sarah Bernhardt (1844-1923). Occasion de rappeler qu’à travers toutes ces vies, « la divine » sut aussi prêter sa notoriété à la « Croix-Rouge », en 1870 puis en 1917…

Pour Victor Hugo, elle est « la voix d’or » pour la presse, « la plus grande tragédienne », « la divine » ou encore « l’Impératrice du Théâtre ». Pour la Croix-Rouge, Sarah Bernhardt est l’une de ses plus anciennes et célèbres volontaires. Pensez, 1870 ! La vénérable institution a à peine 7 ans.

L’action se passe au Théâtre de l’Odéon à Paris en décembre 1870, deux mois après la déroute de Napoléon III à Sedan dans les Ardennes. C’est la fin brutale du Second Empire, l’avènement, encore incertain, de la IIIème République (le 4 septembre). L’Empereur des Français et son armée sont prisonniers. Ivres de victoire, les Prussiens foncent sur Paris. Ainsi commence un siège long et terrible, durant lequel les Parisiens mangent (entre autres) l’éléphant du Jardin du Luxembourg…

Comédienne reconnue et « infirmière » Croix-Rouge à 26 ans

Les armées d’outre Rhin bombardent nuit et jour la capitale. Dans son journal, Hermione Quinet (l’épouse d’Edgar, l’historien et républicain) note : « contre toutes les lois de la guerre, ils [les Prussiens] n’ont pas donné l’avertissement en usage qu’ils allaient commencer le bombardement. Des habitants inoffensifs, des vieillards tués, des  femmes, des jeunes filles tuées, des enfants tués, des médecins tués, des infirmiers tués ».

L’ambulance Sarah Bernhardt

Dans le quartier du Théâtre de l’Odéon, aux premiers jours de janvier 1871, les obus continuent de pleuvoir, un toutes les deux minutes. Transformé en ambulance Croix-Rouge, le théâtre accueille depuis des semaines des dizaines de soldats blessés. Au début des combats, Sarah Bernhardt est à l’affiche de « l’Autre », une comédie de sa camarade George Sand. Le théâtre est réquisitionné, accueille ses premiers blessés. Sarah et ses consoeurs artistes s’affairent auprès d’eux.

« Des obus sont tombés dans l’ambulance de l’Odéon. Les malades qui ont pu se lever, ont quitté leur lit couvert de gravier. Les plus atteints ont été portés dans les caves par les intrépides infirmières et les artistes, qui ont transformé le théâtre en hôpital », note Hermione Quinet. Après ces jours difficiles, l’ambulance Croix-Rouge est déménagée rue Taitbout, hors de portée des canons. Sarah Bernhardt en demeure la patronne. Parmi ses patients, il en est un qu’elle affectionne particulièrement : un jeune officier, Ferdinand Foch. Il deviendra bientôt, grâce à elle, l’un des militaires les plus en vue de la Belle Epoque, ami de Rostand, de Proust et de bien d’autres.

En 1917, elle « reprend » du service Croix-Rouge

Le jeune officier Foch de la guerre de 1870 est devenu Maréchal de France. En 1917 l’extraordinaire carrière de Sarah Bernhardt est derrière elle. Elle devient le temps d’un tournage, l’héroïne d’un nanard patriotique « Mères françaises » de Louis Mercanton. Elle y  incarne une infirmière de la Croix-Rouge dévouée corps et âme à un blessé que les combats ont rendu aveugle…

La Mère Lachaise

Amputée de la jambe droite à la suite d’une tuberculose osseuse, elle réaffirme malgré tout, à 73 ans et en chaise à porteur, son soutien aux troupes dans les tranchées. Durant cette incroyable tournée, les Poilus la surnomment affectueusement la Mère Lachaise…