Sur sa carte de visite était écrit « Pierre Barouh – Promeneur ». Il demeure l’inoubliable auteur, avec son complice Francis Lai, de « La bicyclette » créée par Yves Montand. Pierrot fut aussi celui qui fit traverser l’Atlantique à la bossa nova grâce à sa maison de disques, Saravah. En 2010, il avait joué le jeu de l’Humanitaire dans tous ses Etats : commenter une des photos CICR de l’Humanité en guerre…

« Le plus brésilien des français » a aussi fait l’acteur  : « Un homme et une femme ». Claude Lelouch, le réalisateur, lui doit d’avoir sauvé le film lorsque les producteurs l’abandonnèrent en plein tournage. Pierrot investit alors tout l’argent de Saravah pour que se finisse le long métrage qui allait immortaliser Anouk Aimée et Jean-Louis Trintignant. Pierre fut remboursé au centuple de son investissement après la Palme d’Or obtenue à Cannes en 1966.

Jusqu’ à la fin de sa vie, Pierre Barouh (1936-2016) s’est promené avec talent en mode triangulé : France-Japon-Brésil. Sûr qu’il déambule encore ; plutôt du côté de la lune, pas trop loin de Prévert et de tant d’autres copains. Je l’avais rencontré au Festival de Télévision de Monte-Carlo en 2010 où, tous deux étions jurys. Il avait accepté de jouer le jeu du choix et commentaire d’une photo issue des archives du CICR.

L’expo accrochée au Grimaldi Forum le temps du festival télé s’intitulait « L’Humanité en guerre ». Pierre y choisit une image terrible et la légende en impro de façon magistrale. Deuxième guerre mondiale. Fusillés du Mont valérien. Un couple enlacé dans la mort.

1944 – France, internés civils éxécutés au fort de Romainville

Pierre Barouh prend à contrepied l’horreur que lui évoque cette photo. Il répond par une anecdote (presque heureuse) de son enfance. En 1942, ses parents, juifs séfarades d’origine turque, étaient parvenus à le confier, lui et ses soeurs, à une famille de paysans. Pierre, gamin garde le souvenir d’années « merveilleuses » à garder les vaches, cueillir les champignons et poser des collets. « A bicyclette » est une évocation de cette période. Il conclut son récit par l’a capella d’une chanson de son ami Daniel Lavoie.

Après cette rencontre, nous nous sommes revus pas mal de fois jusqu’à ce qu’il décide d’aller se promener ailleurs, de l’autre du fleuve.