Le directeur général du CICR, Robert Mardini, vient d’achever une visite en Israël et à Gaza. Voici sa déclaration.

« Hier (NDLR : 2 juin) je me suis rendu à Gaza, et aujourd’hui, j’étais dans le sud d’Israël. Chaque nouveau cycle de violences exacerbe les traumatismes dans cette région. Les gens ont peur de ce que l’avenir leur réserve.

Les personnes que j’ai rencontrées m’ont fait part de leur profond sentiment de fatigue, d’impuissance et de leur incapacité à croire en la possibilité d’un avenir meilleur pour les jeunes générations. L’aide humanitaire dont les Gazaouis ont besoin aujourd’hui ne suffira pas à les protéger si une nouvelle attaque devait se produire dans un futur plus ou moins proche – ce qui est malheureusement à craindre. Seule une solution politique pourra mettre un terme à leurs cauchemars.

J’ai informé les deux parties que le CICR était prêt à servir d’intermédiaire neutre si des négociations devaient s’ouvrir concernant le transfert de détenus ou la restitution de restes humains. Les familles ont le droit de savoir ce qui est arrivé à leurs proches, de pleurer leurs morts et de reprendre le cours de leur vie.

Les habitants de Gaza ont été durement éprouvés par la dernière vague d’hostilités. Chaque nouvel épisode de violence aggrave encore leur situation, les privant une nouvelle fois de leurs moyens de subsistance et de leurs maisons. Ils en ont assez des discours sur la résilience, qui ne servent qu’à masquer le fait qu’ils n’ont pas d’autre choix que de faire chaque fois avec le peu qu’il leur reste.

En Israël aussi, les civils ont payé un lourd tribut. Dans le sud du pays, les communautés ont désormais pris l’habitude de vivre à proximité des abris, tout comme elles ont pris l’habitude d’éteindre les incendies déclenchés par des ballons incendiaires qui détruisent leurs champs et leurs moyens de subsistance.

De part et d’autre de la frontière de Gaza, la peur et la destruction engendrées par ces cycles répétés de violence ont un impact psychologique durable chez les enfants comme chez les adultes, qui peut durer des années.

L’assistance humanitaire, qui permet actuellement de maintenir à flot certains services essentiels à Gaza, n’est pas une solution à long terme.

Toute une génération de jeunes Gazaouis n’ont jamais rien connu d’autre que des frontières fermées et des vagues répétées d’hostilités. Les moins de 18 ans ont déjà fait l’expérience de quatre opérations militaires et d’innombrables flambées de violence. Ils ont besoin d’un peu d’espoir, d’un avenir auquel se raccrocher.

Aujourd’hui, à Jérusalem, je me suis posé la même question : quel avenir peuvent espérer ces jeunes Palestiniens qui vivent sous la plus longue occupation militaire de l’histoire contemporaine ?

Je suis fermement convaincu qu’il faut redonner au droit international humanitaire toute sa place pour remédier aux problèmes juridiques et humanitaires que les politiques d’occupation font peser sur la population palestinienne. Ce n’est pas uniquement en respectant ces normes de droit que l’on mettra un terme à l’occupation, mais cela permettra d’ouvrir la voie vers une solution négociée. Il ne suffira pas de réciter les quatre Conventions de Genève pour résoudre ce conflit. Mais si chaque partie pouvait respecter ses obligations élémentaires, ce serait déjà un premier pas encourageant sur le chemin vers la paix, qui semble pour l’heure interminable et semé d’embûches.

Pour l’instant, la principale préoccupation du CICR est de répondre aux besoins essentiels des habitants de Gaza. C’est pourquoi nous demandons une première rallonge budgétaire de 10 millions de francs suisses (11,1 millions de dollars). Voici quelques exemples des activités menées actuellement par nos équipes sur place :

Une équipe chirurgicale du CICR est récemment arrivée à Gaza, et l’une de nos priorités est de faire venir des stocks supplémentaires de fournitures médicales pour soutenir le système de santé local, déjà fragile et sous pression en raison de l’épidémie de Covid-19 qui sévit dans la région.
Nos équipes viennent en aide aux familles qui ont perdu leurs maisons et n’ont plus accès ni à l’eau ni à l’électricité. Nous concentrons également notre action sur les besoins à plus long terme comme la reconstruction des infrastructures et la fourniture de services de santé mentale, indispensables dans le contexte actuel.
Nous contribuons déjà à la remise en état d’installations de plus grande envergure, telles que les systèmes d’alimentation en eau et de traitement des eaux usées ou encore le réseau d’électricité, et nous comptons intensifier notre soutien dans ce domaine.

Nous continuerons également de soutenir nos partenaires du Magen David Adom d’Israël et du Croissant-Rouge palestinien. »