L’image demeure le vecteur principal de la propagande humanitaire, de la communication, pardon ! Le CICR l’a compris dès sa naissance en 1863 et a fait appel à des photographes pour illustrer les combats en faveur du droit international humanitaire. Le photographe Lucien Lorelle s’est aussi essayé à la photo humanitaire, pour la Croix-Rouge française. C’était en 1949.

49, année philanthropique

1949, année très importante. Elle voit la naissance des quatre Conventions de Genève protégeant les civils et les combattants blessés ou détenus dans les guerres. 1949 est aussi une révélation : la moitié de l’humanité vit sous le seuil de pauvreté. Le président Truman l’affirme dans son discours d’investiture de son deuxième mandat à la Maison Blanche.

La France rongée par la pauvreté

L’année 1949 est aussi celle d’un jeune curé, Henri Grouès qui crée les Compagnons d’Emmaüs. Il entrera dans l’histoire sous le nom de l’Abbé Pierre (1912 – 2007). Son œuvre exceptionnelle contre les pauvretés lui survivra. La Croix-Rouge française n’est pas en reste cette année-là. Forte de son important réseau, elle aussi s’engage auprès des plus vulnérables. Le pays subit toujours les restrictions de l’après-guerre et peine à se remettre de l’occupation allemande et de la collaboration. Les pauvres sont légions.

C’est ainsi, qu’à l’instar de l’Abbé Pierre, la société nationale de la Croix-Rouge lance une croisade. Pour la propagande par l’image, elle fait appel au portraitiste en vogue de l’après-guerre, le photographe Lucien Lorelle (1894-1968).

Petite leçon de propagande

Voici une petite leçon de photographie de propagande dans les coulisses d’une création intitulée « La pauvreté ». Lucien Lorelle révèle sa façon de construire une composition. Un travail préparatoire, soigneusement commenté, témoignage des discussions entre la Croix-Rouge française et le photographe : « Couper cette surface (2 objets au lieu d’un) », « Remplacer par de la layette », « à équilibrer, mettre un biberon », « ne pas conserver de bague », etc.

Ainsi, « la pauvreté » deviendra une affiche au message plus qu’interpellatif : « Pour sauver mon enfant, aidez la Croix-Rouge française  » ! Elle sera complétée par une autre, montrant un enfant, signée elle aussi Lorelle.

Au-delà de la propagande humanitaire, on doit à Lucien Lorelle, le « Groupe des XV ». Dès 1946, cette association milita pour que la photographie soit reconnue comme un art à part entière et que soit sauvegardé son patrimoine. Le portraitiste qui tutoya le surréalisme, la peinture et l’écriture est aussi à l’origine du laboratoire Central Color bien connu des photographes professionnels et des galeristes.