Rien qu’en France, 80 000 modèles de cartes postales furent produits et diffusés à des milliards d’exemplaires. 4 à 5 milliards selon les historiens auxquels s’ajoutent des dizaines de milliards d’autres s’agissant de tous les belligérants !
Donner des nouvelles…
En France, la carte postale est devenue, dès le début de la mobilisation, le 2 août 1914, un enjeu patriotique et stratégique. Pour le Ministère de la guerre, les centaines de milliers de jeunes hommes, arrachés brutalement à leur milieu social, familial, professionnel, doivent pouvoir garder un lien avec leurs proches.
C’est ainsi que l’administration va offrir à tous les soldats des « cartes de correspondance militaire » avec franchise postale. En parallèle, la même autorité va permettre aux familles de répondre aux fils, époux ou pères, grâce à des cartes bénéficiant de tarifs subventionnés. Jusqu’à la fin de 1914, un million et demi de lettres et de cartes seront quotidiennement acheminées. Le système postal, parfaitement débordé, devra subir une rapide et profonde restructuration. C’est ainsi que naît la poste moderne.
Côté commercial, certains éditeurs, comme la célèbre maison Deley avec sa batterie de photographes et graphistes, produiront 25 modèles de cartes différents chaque semaine pour disposer en 1918 d’un catalogue de 1800 pièces !
L’infirmière Croix-Rouge en trait d’union
Dans l’iconographie, l’infirmière Croix-Rouge au chevet du blessé ou du malade sera un thème privilégié se distinguant des millions de cartes-vues (photographies militaires) et des « Fantaisies patriotiques ». Le récit de la guerre à travers ce medium oppose fortement deux mondes, celui des hommes, le front et celui de l’arrière, les femmes (et les enfants).
Or, les seules femmes représentées au front ou dans les hôpitaux de l’avant sont les infirmières Croix-Rouge. En fonction des cartiers, elles véhiculeront des représentations très diverses, allant de l’égérie patriotique, à la mère en passant par la fiancée, la nonne, la Madelon ou encore et bien entendu, Marianne !
La carte postale, support du lien familial
Pour les familles, la carte postale, Croix-Rouge ou non, permet aux êtres séparés de communiquer des nouvelles comme autant de preuves de vie. Pour les autorités, elle offre un contrôle facile du contenu des échanges postaux puisque chaque carte passe à la censure.
Ce système demeure la base du message Croix-Rouge encore aujourd’hui. Lors de visites en détention par exemple, le CICR permet aux détenus de communiquer avec leurs proches des informations à caractère strictement familial. En effet, ceux-ci, avant d’être remis au CICR qui se chargera de l’acheminement, passeront à la censure de la prison.
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Concluons sur la première guerre mondiale avec cette question : combien de cartes postales l’Agence internationale des prisonniers de guerre (créée en 1914 par le CICR à Genève) a-t-elle « routée » vers les milliers de camps de détention ? A défaut d’un chiffre, il est raisonnable d’affirmer, beaucoup !
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