Chaque année, le 8 mai, jour de mémoire et de victoire, marque aussi la Journée mondiale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. C’est à cette date – anniversaire de la naissance d’Henry Dunant, fondateur du Mouvement – que l’on célèbre les principes humanitaires qui, depuis plus de 160 ans, inspirent l’engagement de millions de volontaires et de travailleurs humanitaires à travers le monde.

Cette journée rend hommage à ce qui est devenu le plus grand Mouvement humanitaire au monde, fort de 80 millions de membres et volontaires, tous unis autour d’une mission commune : prévenir et soulager les souffrances humaines, partout, en tout temps.

En 2025, le thème choisi par le Mouvement international – « Du côté de l’humanité » – place un accent particulier sur ce principe fondateur qui rend tous les autres possibles.

L’humanité n’est pas seulement le premier des sept principes fondamentaux : elle en est le socle. C’est elle qui inspire l’impartialité, justifie la neutralité, exige l’indépendance. Dans un monde traversé par les conflits, les catastrophes et les crises, choisir l’humanité, c’est rappeler que chaque vie compte.

Mais que signifie concrètement, sur le terrain, agir selon ces principes humanitaires ? Comment ces mots – humanité, impartialité, neutralité, indépendance – résonnent-ils dans nos actions auprès de communautés profondément fragilisées ?

C’est ce que racontent celles et ceux qui, chaque jour, les incarnent.

L’humanité comme principe fondateur

Les principes humanitaires ne sont pas de simples slogans. Ils sont des repères concrets dans l’urgence, des outils de dialogue dans les contextes les plus complexes. Face à la souffrance, aux doutes ou à la défiance, il faut savoir expliquer, incarner, justifier ces principes. Et surtout, les faire vivre.

Simada Barnes, volontaire-secouriste de la Croix-Rouge camerounaise à Kolofata, connaît cette réalité de l’intérieur :

« Ayant moi-même été victime de conflits, je comprends profondément la souffrance des bénéficiaires. Cela renforce mon courage et ma motivation à leur venir en aide. »

Cette proximité avec la douleur de l’autre, cette capacité à transformer une épreuve personnelle en engagement humanitaire, résume à elle seule la force du principe d’humanité : soulager, non par devoir, mais par résonance. Parce que l’on comprend ce que signifie perdre, fuir, espérer.

Seydou Diallo, volontaire de la Croix-Rouge malienne, évoque ce lien concret qui se crée sur le terrain :

« Je prends un réel plaisir à effectuer ce travail, c’est tellement gratifiant. Ce que je préfère le plus, c’est voir les sourires et les larmes de joie à la fin d’une mission. Cela me conforte à faire de mon mieux pour revoir ce bonheur dans leurs yeux. »

Seydou Diallo, volontaire de la Croix-Rouge malienne, aide à rétablir les liens familiaux en facilitant les appels entre proches séparés par le conflit ou la migration. Camp de déplacés de Sénou, Mali.

Ces sourires, ces larmes, sont autant de preuves que l’action humanitaire touche quelque chose de profond : la dignité retrouvée. Mais certaines blessures ne se voient pas. Darlene Alvarado, psychologue pour le CICR au Honduras, agit justement là où la souffrance est silencieuse :

« Dans les contextes de violence, les blessures les plus profondes ne sont pas toujours visibles. Accompagner d’un point de vue psychosocial n’est pas seulement une tâche technique, mais un acte d’humanité. »

« Ce que nous faisons est important parce que nous créons des espaces où les personnes touchées par la violence peuvent se sentir écoutées, validées et comprises. […] La présence empathique, respectueuse et humaine est souvent le véritable impact de notre travail. »

Dans des contextes où tout vacille, l’action des volontaires et du personnel humanitaire recrée un espace de sécurité, restaure des repères, et ravive le lien humain.

Pour Amna Al-Akhras, spécialiste en soutien psychosocial du Croissant-Rouge palestinien à l’hôpital de campagne de la Croix-Rouge dans la bande de Gaza, ce lien humain est le moteur de son engagement :

« Voir le cœur d’un enfant commencer à guérir est ce qui me pousse à continuer. Cela me rappelle que l’humanité n’a pas à s’éteindre en même temps que la vie de ceux que nous aimons. »

Amna Al-Akhras anime une activité avec un enfant à l’hôpital de campagne de la Croix-Rouge dans la bande de Gaza — un geste simple pour apaiser les traumatismes et redonner une place à l’enfance, même au cœur de la crise.

Dans tous ces récits, une évidence s’impose : l’humanité vit dans les actes. Le tout premier principe qui rappelle que, quelles que soient les circonstances, l’humain passe avant tout. Soigner, écouter, protéger. Même quand la neutralité est incomprise, quand l’impartialité est contestée, quand l’indépendance est menacée, l’humanité reste le fil conducteur.

Mettre les principes en lumière, c’est souligner leur force

À l’heure où la polarisation des conflits brouille les repères, où la désinformation alimente la méfiance envers les humanitaires, mettre les principes humanitaires en lumière, c’est rappeler qu’ils sont tout sauf théoriques.
Ils sont l’ossature invisible de ce qui permet l’accès, le dialogue, la protection. Et ils animent les choix quotidiens de celles et ceux qui agissent.

En cette Journée mondiale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, saluons l’exigence éthique, la fidélité aux principes et la force d’engagement que le Mouvement s’efforce de maintenir depuis plus de 160 ans – parfois au prix de choix difficiles, mais toujours au service de l’humanité.

Les principes humanitaires ne sont pas une contrainte. Ce sont notre promesse – et notre cap.