L’intensification du conflit armé dans la province du Nord-Kivu entre les combattants du Mouvement du 23 mars (M23) et l’armée congolaise a des conséquences dévastatrices sur la population civile. Les combats, qui ne touchaient jusqu’alors que le territoire de Rutshuru, ont atteint celui du Masisi, provoquant le déplacement de milliers de personnes vers la capitale provinciale Goma.
« Les combats se rapprochent des zones urbaines densément peuplées et cela est extrêmement préoccupant. Le CICR rappelle à toutes les parties au conflit qu’elles doivent respecter le droit international humanitaire et notamment prendre toutes les précautions pratiques possible pour protéger les civils et leurs biens des effets des combats », rappelle Pascal Hundt, chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en République démocratique du Congo.
Les affrontements ont repris de manière significative entre les combattants du M23 et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), poussant des centaines de milliers de civils à fuir les combats.
« Cette crise est en train de se transformer en catastrophe humanitaire. Si les déplacements se poursuivent, elle va dépasser notre capacité de réponse, ainsi que celle des autres organisations humanitaires », estime Anne-Sylvie Linder, cheffe de la sous-délégation du CICR à Goma. « Il n’y aura peut-être pas d’endroits où recevoir toutes ces personnes. Il n’y a déjà plus de lieux disponibles dans le territoire du Nyiragongo qui avait accueilli les premiers déplacés. »
« Quand les affrontements sont devenus plus forts, les gens ont paniqué et se sont enfuis dans toutes les directions », témoigne Béatrice Ndayunvayino, 35 ans, habitante de Kingi, dans le territoire de Masisi. « J’ai fui avec mes six enfants, une casserole et un bidon jusqu’à une école à Sake où il y avait déjà beaucoup de monde. »
Des déplacements à répétition
Certaines personnes ont dû se déplacer à plusieurs reprises en raison des combats incessants. C’est ainsi que des milliers de familles sont arrivées jusque dans la ville de Goma. D’autres font des mouvements pendulaires pour s’adapter continuellement à ces conditions de sécurité qui peuvent se dégrader rapidement.
Rachel Masika, 30 ans, mère de six enfants, raconte : « J’avais pris la route de Tongo, puis j’ai atteint Kabizo, où je ne suis restée que quelques jours. J’ai poursuivi vers Katsiru. Ensuite, je me suis dirigée vers Kitchanga. Après une semaine, les gens ont commencé à fuir cette ville, alors j’ai encore marché pour atteindre Sake au bout de trois semaines et demie. C’est épuisant. »
Ces déplacements successifs de population, conjugués à la dégradation des conditions de sécurité, rendent encore plus difficile l’acheminement de l’aide humanitaire aux nombreuses victimes de ce conflit.
Conditions de vie de plus en plus précaires
Outre les camps de fortune où s’entassent les personnes fuyant les affrontements, de nombreuses familles résidentes, vivant déjà dans des situations précaires, ont accepté de recevoir chez elles de nouveaux arrivants.
Les conditions de vie sont extrêmement précaires pour les déplacés. « Nous dormons comme des animaux entassés. Mais que faire ? Un déplacé n’a pas le temps de dormir, il ne se contente que de là où il peut poser sa tête parce qu’il n’est pas chez lui », confie Cécile Nabuko, déplacée à Sake.
A Goma, les acteurs humanitaires estiment qu’il y a actuellement plus de 300 000 personnes déplacées dans toute la ville. « Une partie de ces personnes se trouve à Bulengo, Lac Vert, où un site a été préparé, et également à Rusayo, un quartier périphérique de Goma, où plusieurs hectares ont été rendus disponibles par les autorités », indique Anne-Sylvie Linder. Le site du Lac Vert comporte néanmoins un risque important pour ces populations en raison d’émanations potentielles de gaz méthane.
L’arrivée quasi quotidienne de nouveaux déplacés à Goma et dans sa périphérie exerce une surcharge sur les services sociaux essentiels, affectant ainsi la capacité des populations locales et déplacées à accéder aux biens nécessaires à leur survie, dont l’eau, la nourriture, ou encore les soins de santé dans des structures médicales où affluent de nombreux blessés et malades.
Les actions du CICR
Le CICR a déjà mené de nombreuses actions en faveur des personnes touchées par le conflit, notamment dans les territoires du Rutshuru, du Nyiragongo et du Sud-Lubero.
Il soutient la prise en charge des blessés au centre hospitalier Bethesda-Ndosho de Goma, à l’Hôpital général de Beni et à l’Hôpital provincial de Bukavu où il dirige un programme de chirurgie de guerre. « Nous travaillons presque à pleine capacité de manière constante au centre hospitalier de Ndosho à Goma », précise Anne-Sylvie Linder. « Je pense que nous sommes face à une crise humanitaire de grande ampleur, dont les retombées se feront sentir à moyen et long termes. »
Le CICR travaille en étroite collaboration avec la Croix-Rouge de la RDC dans les interventions de premiers secours, l’eau et l’assainissement ainsi que le rétablissement des liens familiaux.
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