En 2023, « Trace The Face » fêtera ses 10 ans. Ce service en ligne initié et développé par le CICR et les sociétés nationales de Croix-Rouge européennes s’adresse à toute personne à la recherche d’un proche porté disparu sur les routes de la migration. A deux jours de la journée internationale des migrants, retour sur un service humanitaire original.

Chaque année, des milliers de migrants disparaissent en route vers l’Europe. La rupture du contact peut avoir des causes multiples. On pense évidemment aux décès ; les naufrages en Méditerranée les évoquent tragiquement. Mais il peut aussi s’agir d’incapacité technique à pouvoir communiquer avec ses proches à cause d’une perte ou casse de smartphone, une hospitalisation ou encore la détention.

La photo, depuis plus de cent ans

Face à cette problématique et soucieux d’optimiser son travail séculaire dans la recherche des personnes portées disparues, le CICR avec Trace The Face (littéralement « suit le visage » en français) a recyclé ce vieux medium qu’est la photographie. Dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, les Croix-Rouge collectaient les photos des soldats capturés pour en faire des listes et informer les familles de leur sort. Tel père, tel fils n’était pas mort, mais est bien détenu…

Se faire tirer le portrait à la Croix-Rouge et se signaler à la recherche de…

Cent ans plus tard, le principe est inverse. Le site Trace The Face propose une photothèque non pas des portés disparus mais de celles et ceux qui recherchent des proches disparus. Grâce au formidable réseau des Croix-Rouge européennes, les requérants peuvent se faire tirer le portrait dans le bureau de la Croix-Rouge le plus proche.

« Trace the Face est un outil adapté à la complexité des disparitions liées à la migration. La personne recherchée peut se trouver n’importe où sur le parcours de l’exil, en dehors même de l’Europe » explique Lucile Marbeau, chargée de la communication de Trace the Face. « Aujourd’hui, de plus en plus de pays en dehors du continent européen, en Afrique notamment, offrent la possibilité aux familles de publier leur photo ». Le site augmente ainsi la probabilité pour des personnes de se retrouver. Ce service humanitaire s’inscrit dans la philosophie du droit de savoir des familles de ce qu’il est advenu d’un proche porté disparu.

Augmenter les probabilités des retrouvailles

Quasi chaque semaine, grâce à Trace The Face, un premier contact, le plus important, est établi, parfois après des mois voire des années de silence. Le chiffre peut paraître modeste mais si l’on se met à la place des familles vivant l’absence et le doute, on en comprend sa force. En novembre, quatre « remises en contact » ont pu avoir lieu.

Un récit de remise en contact grâce à « Trace The Face » (un parmi d’autres…)

Les histoires de retrouvailles racontent autant la complexité des parcours de l’exil, que celles des drames de la guerre, à l’instar de cette femme irakienne qui a perdu pendant la trace de son mari pendant trois ans. Celui-ci avait dû fuir l’Irak, laissant sa femme et deux enfants derrière lui. Plus tard, contrainte à son tour de quitter le pays, elle perd son téléphone en Turquie, et tout moyen de contacter son époux. Arrivée en France avec ses deux filles, elle se rend à la Croix-rouge française et publie sa photo sur Trace the Face. Quelques heures plus tard, un message arrive : « C’est ma femme, dites-moi où elle est ! » L’époux, inlassablement, se connectait tous les jours à Trace the Face dans l’espoir d’y trouver le visage de sa bien-aimée.