La période 2011-2021 aura été une décennie tragique pour le jeune Soudan du Sud. A part les deux années qui ont suivi l’indépendance de 2011, le pays n’a connu qu’un impitoyable conflit. Ce 9 juillet, le Soudan du Sud fêtera ses dix ans.

En 2013, l’année commence bien. Le 25 janvier, le Soudan du Sud ratifie les Conventions de Genève et leurs protocoles additionnels. Il devient le 196ème Etat partie aux textes majeurs du droit international humanitaire. Mais l’espoir sera de courte durée. Le jeune Etat s’enfonce dès décembre 2013 dans une féroce guerre civile qui, selon les Nations unies, a fait 380 000 morts. Les conséquences humanitaires sont épouvantables et continuent encore aujourd’hui de toucher l’ensemble de la population.

Pénuries de tous ordres

L’affaiblissement voire l’effondrement du système de santé, déjà fragilisé par la violence, n’est que l’un des symptômes de la décennie écoulée. Manque de nourriture, pénuries de tous ordres, insécurité, déplacements de population, inquiétude quant au sort de proches portés disparus, font le quotidien de millions de Soudanais du sud.

Soins de santé : un luxe

Dans ce pays, où 9% des enfants meurent avant l’âge de 5 ans, les populations doivent marcher des heures, parfois des jours, pour pouvoir bénéficier de soins. 60% des centres de santé ne fonctionnent plus. Sont en cause le conflit et les attaques délibérées mais aussi le nombre limité de professionnels de santé à l’échelle nationale. Il n’est pas rare que l’on meurt en chemin tant les distances sont longues à parcourir.

« Il n’y a pas d’hôpitaux ici. Une fillette gravement malade est morte en route pour le dispensaire. On l’a retrouvée dans un buisson », explique un chef communautaire en Équatoria-Occidental, où (sur)vivent des milliers de familles déplacées. Pour tenter d’améliorer sa réponse humanitaire en matière de santé, le CICR soutient depuis dix ans un réseau de centres de soins de santé primaire. 1,5 million de consultations y ont eu lieu.

Repousser le spectre de la famine

Un tiers des Soudanais du sud ont dû fuir terres et maisons. Sans gagne-pain, incapables de subvenir aux besoins les plus essentiels de leurs familles, ces déplacés se retrouvent, parfois depuis des années, entièrement dépendants de l’assistance humanitaire. Face à cette situation, le CICR et la Croix-Rouge du Soudan du Sud (SSRC) ont distribué de la nourriture à plus de 3,3 millions de personnes, vacciné plus de 5,2 millions de têtes de bétail et distribué des semences et des outils à plus de 3 millions de personnes.

Rétablir les liens familiaux

Les déplacements massifs de population au fur et à mesure de l’escalade du conflit ont abouti à de nombreuses séparations au sein des familles. Rétablir le lien devient parfois – avant manger ou savoir où dormir – la priorité pour les membres d’une même famille. Au cours de la décennie écoulée, le CICR a enregistré les demandes de familles portant sur plus de 6000 portés disparus et contribué à retrouver la trace de quelque 3000 personnes. En outre, 130 000 appels téléphoniques, salamat ou courts messages, ont permis de renouer le lien familial le temps d’un appel.

La triple peine

A la guerre s’ajoutent désormais le changement climatique et depuis plus d’un an, la pandémie de Covid-19. S’il apparaît compliqué d’agir en même temps sur ces trois facteurs, il demeure crucial d’encourager le processus de paix. « Il faut parvenir à une stabilité et à une sécurité à long terme pour les familles dévastées par les conflits et la violence armée. Les conditions permettant de construire espoir et avenir doivent être fixées », estime Julien Lerisson, chef de la délégation du CICR au Soudan du Sud.