Toujours pas remis des destructions du Cyclone Idaï, en mars 2019, et sujet à des violences grandissantes dans le nord, le Mozambique doit aussi faire face à la pandémie de Covid-19. Pour les milliers de personnes contraintes de se déplacer, de fuir menaces et combats dans la région de Cabo Delgado, les conséquences humanitaires cumulées des trois fléaux sont très lourdes. Aux alentours de Pemba, capitale de la province du nord du pays, le CICR a ouvert un centre de Covid-19 pour les déplacés et les familles qui les accueillent.

Dans cette zone densément peuplée où les locaux hébergent les déplacés et où le nombre de personnes positives à la Covid-19 augmente, le Comité international de la Croix-Rouge a contribué à créer le plus grand centre de traitement du pays, qui ouvre ses portes aujourd’hui. Celui-ci pourra accueillir jusqu’à 400 patients et sera accessible à plus de 240 000 personnes vivant dans la zone.

Violence et Covid-19 : la double peine des déplacés

Les familles qui arrivent à Pemba ont dû quitter leur foyer les mains vides quasiment. Elles sont épuisées et traumatisées. Suite aux récentes attaques à Mocímboa da Praia et d’autres localités de la province, davantage de déplacés devraient probablement gagner la ville dans les semaines à venir.

« Les personnes qui fuient le conflit armé au Mozambique ne font que troquer ce danger mortel contre le risque de contracter la Covid-19. Le nouveau centre de traitement va aider la communauté à faire face à la crise sanitaire, mais ces familles ne pourront pas rentrer chez elles tant que les combats se dérouleront à proximité des habitations », explique Raoul Bittel, le chef des opérations du CICR à Pemba, au Mozambique.

Le risque de contracter la Covid-19 à Pemba, l’un des foyers les plus inquiétants au Mozambique, est élevé. La plupart des personnes déplacées sont accueillies chez des proches, qui voient leur situation déjà fragile s’aggraver. La proximité est telle qu’il paraît utopiste de respecter une quelconque distanciation physique.

« Le Décimo Congresso est le plus important centre de traitement de la Covid-19 au Mozambique », indique le Dr Basilio dos Mwelus, responsable du Département de la planification à la Direction provinciale de la Santé. « Nous espérons que nous n’aurons pas à exploiter l’établissement au maximum de ses capacités, mais tout est prêt si cela devait être le cas. C’est d’autant plus crucial dans la province de Cabo Delgado, qui compte un grand nombre de déplacés et une forte concentration de population particulièrement exposée au risque de contamination. »

Une intensification des violences en 2020

Les attaques qui ont récemment frappé Mocímboa da Praia sont le dernier exemple en date d’une tendance inquiétante, où l’on voit l’accès humanitaire se réduire à mesure que le conflit armé s’intensifie. À Mocímboa da Praia, Macomia et dans d’autres villes et villages de Cabo Delgado, le conflit n’épargne ni la population ni les structures essentielles à sa survie. Des maisons sont incendiées, des écoles et des structures médicales pillées et détruites, et des terres agricoles ravagées. Des centaines de personnes ont été tuées, blessées ou sont portées disparues, et des centaines de milliers n’ont d’autre choix que de quitter leur foyer pour aller se cacher dans la brousse ou fuir encore plus loin.

Si la province de Cabo Delgado, riche en ressources naturelles, subit la violence depuis 2017, celle-ci s’est intensifiée en 2020. Ainsi, des villes jusque-là épargnées, où les déplacés venaient prendre refuge, sont désormais attaquées.

Fin mai, la ville de Macomia, où le CICR œuvre depuis un an à rétablir les services de santé et d’approvisionnement en eau, a été prise pour cible. La population de la ville a fui dans la brousse et plus au sud, dans des bateaux de fortune. Dans les affrontements, une maternité, remise en état par le CICR après le passage du cyclone Kenneth en 2019, a également été détruite.

Activités du CICR et problèmes humanitaires à Cabo Delgado

  • Les attaques qui ont récemment frappé Mocímboa da Praia sont le dernier exemple en date d’une tendance inquiétante, où l’on voit l’accès humanitaire se réduire à mesure que le conflit armé s’intensifie. Nous sommes extrêmement soucieux du bien-être des familles qui vivent dans la peur et qui n’ont pas accès aux secours humanitaires essentiels auxquels elles ont le droit, comme des soins de santé, un logement, des denrées alimentaires ou de l’eau potable.
  • L’attaque lancée contre la ville de Macomia a contraint le CICR à suspendre ses activités, déjà entravées depuis des mois par des ponts et des routes rendus impraticables par les inondations. Les travaux d’amélioration de l’approvisionnement en eau dans la ville n’ont par conséquent pas pu être achevés. Une maternité, remise en état après le passage du cyclone Kenneth et qui avait pu rouvrir en décembre 2019, a par ailleurs été détruite lors des affrontements.
  • Le CICR, en collaboration avec la Croix-Rouge du Mozambique, va renforcer les programmes à Cabo Delgado afin de répondre aux besoins humanitaires croissants liés au conflit armé. Les structures médicales, qui doivent prendre en charge davantage de personnes et traiter des blessures par arme, recevront davantage de matériel sanitaire et de fournitures médicales. Parallèlement, des infrastructures, comme les systèmes d’approvisionnement en eau, seront remises en état. Les volontaires de la Croix-Rouge du Mozambique continueront leur travail de sensibilisation aux maladies transmissibles. Le CICR et la Croix-Rouge du Mozambique prévoient également de distribuer des articles de secours tels que des nattes, des moustiquaires, des bâches et du savon aux familles déplacées durant l’année à venir, et de mettre à leur disposition de l’eau potable et des installations sanitaires.
  • Pour faire face à l’augmentation des cas de Covid-19 à Pemba, le CICR a contribué à la construction du Décimo Congresso, le plus grand centre de traitement du pays, en collaboration avec l’Organisation mondiale de la Santé, Médecins sans frontières et l’UNICEF. Cet établissement peut immédiatement accueillir 200 patients et a une capacité maximale de 400 patients.
  • Le CICR et la Croix-Rouge du Mozambique ont déjà organisé de nombreuses distributions d’articles de secours à l’intention des familles déplacées qui se sont réfugiées à Pemba. Cette année, nous avons distribué des ustensiles de cuisine, des bâches, des articles d’hygiène et d’autres biens essentiels à plus de 12 500 personnes, tout en respectant les règles de distanciation physique imposées par la pandémie de Covid-19. Nous avons aussi aidé 150 ménages particulièrement vulnérables à couvrir leurs dépenses grâce à des dons en espèces.