Le capitaine Georges Bayol (1871-1914) croyait tant à l’espéranto qu’il eut l’idée de promouvoir la langue auxiliaire internationale à travers toutes les Croix-Rouge de la planète. L’objectif était d’affranchir le personnel soignant de la barrière linguistique afin de mieux pouvoir traiter les blessés conformément à ce que prévoyait la Convention de Genève.

« Esperanta por la Ruĝa Kruco »

En 1906, l’officier, alors lieutenant, publie en neuf langues « Esperanto et Croix-Rouge » dont l’un des premiers exemplaires est adressé et dédicacé comme il se doit à Gustave Moynier, président d’alors de l’Internacia Komitato de la Ruĝa Kruco, comprenez CICR !

« Puisse l’alliance de l’Étoile verte de l’Esperanto à la Croix-Rouge de Genève, facilitant les relations internationales, permettre aux personnes généreuses portant le brassard de la Croix-Rouge d’accomplir encore plus de bien. » « Nous serons sûrs alors d’avoir été utile à la grande famille humaine. »

A l’usage des soignants

Véritable manuel d’apprentissage, « Espéranto et Croix-Rouge » se destinait « à l’usage des militaires blessés ou malades, des médecins, chirurgiens, brancardiers, infirmiers, des membres de la Croix-Rouge et des ministres de tous les cultes, de tous ceux, en un mot, qui sont appelés en temps de guerre à donner des soins ou à en recevoir, dans les ambulances, hôpitaux et toutes formations sanitaires ».

Ainsi, puisque le soldat blessé en campagne et ceux qui s’en occupent, sont protégés par un emblème universel, pourquoi une langue commune universelle ne contribuerait-elle pas à améliorer secours et soins ?

(Soignants, secouristes, vous pouvez d’ores et déjà vous mettre à l’espéranto de secours grâce au guide en ligne.)

Telle était l’utopie de Bayol, tué à l’ennemi le 10 novembre 1914 durant la bataille de la Marne.

L’espéranto, une résolution de la Croix-Rouge en 1921

L’officier espérantiste avait néanmoins vu juste et l’idée d’une langue universelle pour les secours faisait son chemin… Lors de la Xème Conférence internationale de la Croix-Rouge en 1921, fut reconnue à l’unanimité une résolution présentée par un certain docteur Wong de la Croix-Rouge chinoise :

«Considérant que la difficulté des langues gêne en bien des manières la réalisation de l’idéal international de la Croix-Rouge, soit dans l’oeuvre de secours sur les champs de bataille, soit dans celle des prisonniers de guerre ou même dans les Conférences de la Croix-Rouge, la Xe Conférence invite toutes les organisations de la Croix-Rouge à encourager l’étude de la langue auxiliaire espéranto parmi leurs membres, en particulier dans les sections de jeunesse, comme un des plus puissants moyens d’entente et de collaboration internationale dans le domaine de la Croix-Rouge.»

Un siècle plus tard, fort est de constater que la résolution est passée à la trappe, la Croix-Rouge et le monde moderne se contentant du Globish, Global English, sabir peu inventif !

Et pour la bonne bouche, L’Humanitaire dans tous ses Etats se dit L’Humana en ciuj liaj statoj ! La classe. Quant à une traduction des quatre Conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels en espéranto, le projet ne semble pas encore à l’ordre du jour.

Lire aussi « L’activité humanitaire du mouvement espérantiste pendant les deux guerres mondiales et son rapport avec la Croix-Rouge internationale » de José Maria Rodriguez Hernandez