À 24 ans, malgré les défis, Emat se voit déjà en blouse blanche au service des autres : « Je ferai des consultations et fabriquerai de A à Z des prothèses et des orthèses. Je prouverai à tous que je peux réussir malgré mon handicap » dit-elle, souriante.

Atteinte d’une paralysie flasque au pied gauche à la suite de la poliomyélite, Emat fait partie de la première promotion d’étudiants orthoprothésistes formés au Mali. Déterminée, passionnée et altruiste, elle se bat pour aider les personnes qui, comme elle, souffrent d’un handicap.

« Avant, les étudiants devaient suivre ce cursus à Lomé. Maintenant, ils peuvent être formés au Mali jusqu’à la licence » annonce, joyeux, Amadou Diallo, directeur du Centre National d’Appareillage Orthopédique du Mali (CNAOM).

Au Mali, peuplé d’environ 25 millions d’habitants, il existe seulement 15 orthoprothésistes, tous formés à Lomé, alors qu’il en faudrait plus de 200. Le fossé est énorme et accentue le problème d’accès aux services de qualité pour beaucoup de personnes en situation de handicap.

Amadou explique : « Dans ce contexte, où les conséquences du conflit accentuent le besoin en appareillage, seuls cinq centres d’appareillage sont fonctionnels sur les huit qui existent. En plus, ces centres ne parviennent pas à prendre tous les besoins en charge, car ils manquent cruellement de personnel qualifié ».

Ce problème résulte du manque d’écoles spécialisées au Mali pour la formation de futurs orthoprothésistes ainsi qu’au coût important de la licence à Lomé. Pour combler le besoin, le CNAOM, l’Institut National de Formation en Sciences de la Santé (INFSS) et le CICR ont travaillé étroitement pour créer une filière malienne de formation d’orthoprothésistes. Ainsi le Mali emprunte le chemin autonome pour fournir le marché national et régional en orthoprothésistes qualifiés, disposant de diplômes reconnus au niveau international.

Un centre de formation destiné à soutenir l’école de formation des orthoprothésistes a par ailleurs été construit par le CICR et inauguré par la ministre de la Santé début 2024.

« Avant la construction de ce centre de formation, nous recevions les étudiants directement au CNAOM pour la pratique. Les professionnels concevaient les appareils au même moment où les étudiants recevaient des cours. Ce n’était pas du tout pratique » explique le directeur.

Pour s’assurer de la qualité de la formation, des orthoprothésistes du CICR offrent un coaching direct aux moniteurs et aux étudiants.

Dans les prochains mois, les étudiants de la première promotion (2022), celle d’Emat, recevront leur diplôme de licence et pourront travailler dans les différents centres.

« C’est un rêve qui se réalise pour moi. C’est une revanche que je prends sur la vie » affirme Emat.

Le CICR appuie depuis de nombreuses années le Centre National d’Appa­reillage Orthopédique du Mali (CNAOM) et ses 3 antennes régionales de Mopti (construit et équipé par le CICR en 2021), Tombouctou et Gao pour la prise en charge des personnes affectées par le conflit nécessitant un appareillage orthopédique et des soins kinésithérapeutiques. Il soutient également le Centre Père Bernard Verspieren de Bamako.  En 2023, ce soutien a permis l’appareillage orthopédique de 1 550 patients (dont 833 entièrement pris en charge par le CICR).

Le CICR soutient également des initiatives de réintégration sociale à travers un appui aux associations de personnes vivant avec un handicap et notamment la mise en place d’activités génératrices de revenus.