Que reste-t-il de nos cinq sens, qu’en est-il de notre perception du temps et de l’espace ? Prison Insider et le collectif photographique Item ont posé ces deux questions à des détenus à travers la planète via un medium original : la photographie. En ressort, le projet InsideOutside, une évocation sensible des conséquences de la privation de liberté. Une expérience parlante pour tout délégué détention du CICR.

L’une des missions mandataires du CICR est la visite en détention. S’assurer que les détenus -qu’ils soient prisonniers de guerre ou privé de liberté en lien avec un conflit armé- sont traités conformément aux dispositions du droit international humanitaire. Le rôle du CICR est de les accompagner, parfois des années durant, s’assurer qu’ils sont traités avec humanité au plus proche des conditions de vie acceptables pointées dans les Conventions de Genève. L’une des missions du CICR est aussi de faire entrer et sortir des informations à caractère strictement familial, les fameux messages Croix-Rouge, fil ténu entre le détenu et ses proches. L’épistolaire de guerre, c’est le CICR, pourrait-on dire.

Objectif prioritaire du CICR en détention

  • prévenir les actes de torture et autres formes de mauvais traitements ;
  • prévenir les disparitions et élucider le sort des personnes disparues ;
  • améliorer les conditions de détention (par exemple pour ce qui est de la nourriture, de l’eau et des services de santé) ;
  • rétablir et maintenir les contacts avec la famille ;
  • assurer le respect des garanties judiciaires.

Dans certains cas, le CICR apporte aussi son soutien à d’anciens détenus, en facilitant leur retour dans la société.

La photo entre dans la prison, des mots en sortent

Voilà pourquoi on ne saurait rester insensible au travail produit par un collectif lyonnais de photographes, ITEM et l’ONG Prison Insider : une correspondance photographique entre Bertrand Gaudillère et quatre femmes et neuf hommes de 25 à 60 ans détenus en Argentine, Etats-Unis, Suisse, France, Guatemala, Ukraine, Colombie, Liban, Italie, Japon et Belgique.

Pendant un an Bertrand Gaudillère a adressé aux détenus via Prison Insider une image évocatrice de l’un des cinq sens, accompagnée d’une légende. La photographie devient alors une invitation au dialogue, un témoignage, un passage de relais, un questionnement intime.

Privation de liberté et privation des sens

« L’enfermement altère la santé mentale du captif. Il altère son corps tout autant », souligne Bernard Bolze, fondateur de l’Observatoire international des prisons et co-fondateur de Prison Insider. « Nous avons demandé à des détenues, de contrées, de murs et de cultures que tout sépare, d’évoquer, à partir des images de Bertrand Gaudillère, leur perception du toucher, de la vue, du goût, de l’odeur et de l’ouïe. Et, pour faire bonne mesure, du temps et de l’espace. Nous partons d’un parti pris singulier : quel que soit le pays d’enfermement, la nature du lieu de détention, son confort ou son extrême dureté, le chaud, le froid, l’homme enfermé partage, avec tous les prisonniers du monde, une expérience proche. »

Fin juin, sortira aux éditions Libel, le livre de cette expérience. Bertrand Gaudillère, Clara Grisot de Prison Insider et le graphiste Yannick Bailly en ont assuré la réalisation.