En 1861, tandis qu’Henry Dunant travaille depuis deux ans à son « Souvenir de Solférino« , un pharmacien français fournisseur des armées impériales et grand ami de l’écrivaine George Sand, Henri Arrault, publie  le 10 juin : « Notice sur le perfectionnement du matériel des ambulances volantes » ; des pages qui ressemblent à bien des égards à la première Convention de Genève (1864).

Le Baron Hippolyte Larrey, est le destinataire de la Notice sur le perfectionnement du matériel des ambulances volantes  d’Arrault. Deux ans auparavant, le 24 juin 1859, le chirurgien en chef de Napoléon III est à Solférino, dépassé comme tous par la bataille devenue boucherie. Les services de santé des armées impériales -français et autrichiens- sont totalement dépassés face à 40 000 morts et blessés laissés sans soins.

Deux Henri, une même idée

Les deux Henri, chacun de leur côté, Dunant à Genève, Arrault à Paris, l’un simple civil, l’autre inventeur d’ambulances, l’un traitant son traumatisme de Solférino, l’autre cherchant à améliorer les secours, ne seront jamais amis. Entre eux, il y a pourtant des convergences. Le principe d’Humanité sur le champ de bataille est plus qu’à la mode. Le positivisme en vogue à l’époque doit aussi pouvoir s’appliquer aux victimes des guerres.

Arrault dégaine le premier. Dans sa fameuse « Notice » de 1861, il écrit des recommandations tant voisines de l’esprit de la première Convention de Genève (qui sera publiée trois ans plus tard, en 1864), que c’en est, selon lui, plus que suspect ! A en juger :

Imparable chronologie

Convention de Genève (1864), création du CICR (1863), publication du « souvenir de Solférino » (1862)… La chronologie donne raison à Arrault. Dunant, le CICR et la Suisse lui ont piqué sa contribution de 1861. Tout bon iconoclaste ne manquerait pas de parler de la « Convention de Paris ». Mais, in fine, ce sont les Suisses, à Genève, qui feront le job, plutôt bien, avec la mise en oeuvre par les Etats du texte fondateur du droit international humanitaire. La neutralité helvète y contribua probablement aussi. Certes, une petite reconnaissance d’Arrault par le Comité eût été la bienvenue. Elle aurait par exemple évité à Henry Dunant de se prendre une gifle (épistolaire s’entend) de George Sand.

Arrault 1 – Dunant 0

George Sand est en effet une grande amie de Henri Arrault. En 1865, d’une plume au vitriol, elle va tenter de rendre au pharmacien ce qui appartient désormais à Dunant, à Moynier, au CICR et à la Suisse. Dans cette lettre adressée par voie de presse, l’auteure de la Mare au Diable n’y va pas par quatre chemins…

Henri Arrault, dans sa « Notice », avait même prévu un emblème pour sanctuariser sur le champ de bataille blessés, ambulances et personnels sanitaires : le drapeau noir… Imaginez-vous aujourd’hui un Comité international du Drapeau Noir ? Un petit côté pirate ou anar, non ?