« Dix mille personnes, ce n’est rien dans un conflit où près d’un million ont péri en moins de trois mois. C’est juste un millimètre d’humanité sur des kilomètres d’horreur. »[1]

Philippe Gaillard en 1994, à propos des personnes que le CICR put sauver au Rwanda

Le 6 avril 1994, après des années d’instabilité politique périodiquement marquées par des assassinats et des éruptions de violences meurtrières, le président rwandais Juvénal Habyarimana est assassiné quand son avion est abattu au-dessus de l’aéroport de Kigali. Dans le chaos et la violence qui suivent, le CICR – présent dans le pays depuis le début des hostilités en 1964 – fait face à un défi de taille : adapter ses activités humanitaires à la situation hautement instable et imprévisible. Les vagues de massacres organisés contre les civils de la minorité ethnique tutsi et les Hutus modérés font très rapidement de nombreuses victimes, rendant la majorité des plans d’urgence obsolètes. A travers le pays, des millions de gens fuient leurs villes natales pour échapper aux massacres. Certains réfugiés s’installent dans d’autres régions du Rwanda, d’autres partent pour les pays voisins. Un million de personnes furent tuées durant le génocide contre le peuple tutsi selon les sources les plus crédibles (Nations Unies, gouvernement du Rwanda). Alors que les ambassades, ONGs et agences de l’ONU quittent le pays, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), ainsi que Médecins Sans Frontières, prennent la décision de rester au Rwanda.

Depuis le début du génocide, le CICR met en place des soins médicaux et chirurgicaux pour les survivants. Après l’intensification du conflit à la suite de l’offensive militaire du 8 avril par le Front patriotique rwandais (FPR), les déplacements de populations deviennent à nouveau une préoccupation centrale du CICR dans la région. Pour faciliter ses opérations et venir en aide aux délégations déjà présentes sur place, plusieurs bureaux sont mis en place à travers le pays. Conscients de l’extrême volatilité de la situation, le siège du CICR à Genève se mobilise rapidement et des équipes des Sociétés Nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge viennent renforcer l’effort de secours au Rwanda.

Conçue comme un point d’entrée aux riches collections de la Bibliothèque et des Archives audiovisuelles du CICR, cette page vise à donner un aperçu aussi complet que possible des ressources documentaires publiques[2] disponibles sur les activités du CICR au Rwanda. [3]

Compilation des communications publiques du CICR relatives à ses activités au Rwanda

Après un bref rappel du contexte, ces communications publiques et communiqués de presse donnent un aperçu complet des activités du CICR au Rwanda de 1993 à 1995. Cette compilation inclut le communiqué de presse suivant (numéro 94/16) publié le 14 avril 1994 :

Six blessés achevés dans une ambulance de la Croix-Rouge

Le 14 avril en début d’après-midi à Kigali, des miliciens armés ont achevé par balles, en présence de militaires, six blessés que des volontaires de la Croix-Rouge rwandaise évacuaient ver [sic] l’hôpital de campagne installé la veille par le CICR. Cet acte d’une violence inouïe a contraint le CICR et la Croix-Rouge rwandaise à suspendre le transport des blessés à Kigali, où les règles d’humanité les plus élémentaires sont bafouées. Le CICR lance un vibrant appel à tous les combattants, et en particuliers aux milices armées et à leurs responsables, pour que cessent les massacres, non seulement dans la capitale, maïs [sic] aussi dans certaines provinces atteintes par la vague de violence. Il demande notamment que la Croix-Rouge puisse porter secours aux blessés sans discrimination.

Dans ce communiqué de presse, le CICR dénonce publiquement les violations flagrantes du DIH commises au Rwanda. Le manque de respect manifeste pour l’emblème de la Croix-Rouge met en danger les collaborateurs du CICR et de la Croix-Rouge rwandaise, qui compte sur sa protection pour mener à bien leur travail et sauver des vies. En apprenant l’exécution sommaire de ces six blessés, le siège du CICR à Genève décide – avec l’accord de Phillippe Gaillard, alors chef de délégation du CICR à Kigali – de rendre l’affaire publique en publiant ce communiqué de presse. Le lendemain, l’indignation se répand dans le monde entier alors que divers médias tels que la BBC et Reuters partagent l’histoire. Selon le témoignage de Philippe Gaillard, la Radio Télévision Libre des Milles Collines – une radio rwandaise ayant joué un rôle important dans l’incitation au génocide – déclara par la suite que les ambulances de la Croix-Rouge seraient respectées.

Les communiqués de presse du CICR sont tous numérisés et consultables en ligne.

Rapport annuel 1994 / CICR

Distribution de messages Croix-Rouge. Rwanda, 10/1995 ©CICR/Grabhorn, Paul

Un rapport général sur les activités du Comité International de la Croix-Rouge, ce volume décrit l’action du CICR au Rwanda au moment du génocide et durant le reste de l’année 1994. Structuré par région et par type d’activités (recherches, soins médicaux, eau et assainissement, etc.), le rapport dresse un bilan succinct et complet de l’action du CICR dans l’ensemble du pays.

Brochure spéciale CICR sur le Rwanda / CICR

Publiée en septembre 1994, cette brochure spéciale est traduite en français, anglais, allemand et swahili. Elle s’ouvre sur un aperçu des trois principaux objectifs du CICR au Rwanda au moment du génocide : faire cesser les massacres, maintenir en vie les survivants et fournir une assistance aux camps de réfugiés.

Rwanda 1994 : un témoignage : « On peut tuer autant de gens qu’on veut, on ne peut pas tuer leur mémoire » / Philippe Gaillard (Revue internationale de la Croix-Rouge, 2004)

Philippe Gaillard, chef de délégation du CICR de Kigali. Kigali, Rwanda, 06/1994 ©L’Illustré/Gluntz, Claude

Dans cet article, la Revue publie le témoignage de Philippe Gaillard, chef de la délégation du CICR à Kigali en 1993 et 1994. Le texte reflète son discours lors de la conférence Rwanda 1994 : La vraie vie est absente (Arthur Rimbaud) organisée à Genève le 18 octobre 1994 par le Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Une version anglaise du témoignage de Philippe Gaillard a également été publiée dans Another day in paradise, une compilation de témoignages de travailleurs humanitaires dans divers contextes.

La vendange : les fantômes du Rwanda

Filmé dans la région suisse du Valais où Philippe Gaillard travaille maintenant dans un vignoble, La vendange : les fantômes du Rwanda offre le témoignage personnel de l’ancien chef de la délégation du CICR à Kigali. L’un des rares étrangers à avoir été témoin du génocide au Rwanda – la plupart des ONG et des agences internationales ayant quitté le pays à la mi-avril – Philippe Gaillard raconte son expérience. Dès le début du film, cet avertissement : ce film n’est pas sur le génocide au Rwanda. En effet, c’est un récit émouvant et pudique de l’expérience d’un homme dans un contexte de violence extrême auquel la plupart des gens ne seront jamais confrontés.

When children remember : A history of the Tutsi genocide through the eyes of children (1994 – 2006)

Ijoro ribara uwariraye: seul celui qui a traversé la nuit peut raconter son histoire[4]. Cet article de la Revue internationale de la Croix-Rouge s’ouvre sur un proverbe rwandais d’une importance particulière depuis le génocide. Dans cet article écrit en anglais, l’historienne Hélène Dumas s’appuie sur des témoignages rédigés en 2006 par des enfants ayant survécu au génocide pour analyser leurs stratégies de survie dans un monde bouleversé par la violence.

Plus de ressources des archives audiovisuelles du CICR sur le Rwanda dans les années 1993 à 1995.

Pour en savoir davantage :


[1] Revue Internationale de la Croix-Rouge, Vol. 86, no 855, septembre 2004, p. 616

[2] Conformément à la politique du CICR en matière d’archives, les archives générales de l’année 1994 seront ouvertes à la consultation publique après 2044. Cliquez ici pour en savoir plus sur le règlement d’accès aux archives du CICR.

[3] Toutes les publications présentées ici ont été numérisées, sont disponibles en ligne en texte intégral (voir les liens fournis pour plus de détails) et sont consultables à la Bibliothèque du CICR. La page propose des liens vers les photos et films disponibles en ligne sur le portail des archives audiovisuelles du CICR. Les questions et suggestions sur la façon d’améliorer cette page sont les bienvenues et peuvent être envoyées à library@icrc.org.

[4] Traduction de l’anglais “Only the one who passed through the night can tell its story” Revue Internationale de la Croix-Rouge, Vol. 101, no 910, 2019, p. 38