Un mois après la proclamation d’indépendance de la Bosnie-Herzégovine, l’ancienne république yougoslave s’embrase. Assiégée, divisée, la capitale Sarajevo devient le symbole de la guerre civile qui déchirera la Bosnie-Herzégovine pendant plusieurs années. Retour sur les actions du CICR à travers ses archives.

Jusqu’à la signature des Accords de Dayton en décembre 1995, Croates, Bosniaques musulmans et Serbes s’affrontent sur l’ensemble du territoire. La Bosnie-Herzégovine était pourtant réputée en Yougoslavie comme étant la république où les communautés s’étaient le plus mélangées. C’est là que l’éclatement de la Yougoslavie sera le plus meurtrier.

Dès le début du conflit, le CICR lance un rappel du droit à l’ensemble des belligérants. L’institution commence également à organiser l’assistance, notamment pour la capitale assiégée. Le 18 mai 1992, un convoi du CICR atteint les portes de la vieille ville, mais il est visé par une attaque. Le nouveau chef de délégation Frédéric Maurice est tué alors qu’un autre employé grièvement blessé. Roland Sidler, lui aussi délégué du CICR, est légèrement blessé :

Le CICR suspend brièvement ses activités en Bosnie-Herzégovine jusqu’en juin. Par la suite, il met rapidement en place des activités qui se poursuivront tout au long de la guerre, en fonction de l’accès accordé par les parties comme des conditions sécuritaires : visites de détenus et échanges de prisonniers, assistance, soutien aux hôpitaux, distribution de messages Croix-Rouge…

La population de Sarajevo, elle, manque de tout. Dès la mi-1992, pour contourner le siège de la capitale, l’ONU met en place un ravitaillement par les airs. A partir de 1993, le CICR bénéficiera de ce pont aérien afin d’acheminer de l’assistance, notamment pour les cuisines populaires montées avec les Croix-Rouge locales des deux côtés de la ligne de front.

Sarajevo: distribution de soupe aux personnes âgées dans le besoin. Copyright CICR

Parmi les archives du CICR, nous avons retrouvé le témoignage en 1993 de Philippe Lazzarini, alors chef de délégation du CICR en Bosnie-Herzégovine:

Dans ce témoignage audio daté de fin 1993, Philippe Lazzarini, résume les activités de l’institution, notamment à Sarajevo, mais aussi les défis que rencontrent toutes les organisations humanitaires sur le terrain :

« Il y a relativement peu de place pour l’humanitaire dans ce contexte. C’est un contexte qui est extrêmement politisé, où l’humanitaire est systématiquement utilisé à des fins politiques ou militaires. Evidemment, l’un des principaux défis pour les organisations humanitaires tel que le CICR est d’essayer de préserver cet espace humanitaire »

La guerre prend fin avec la signature des Accords de Dayton en décembre 1995. Le bilan du conflit armé en Bosnie-Herzégovine est dramatique. Plus de 2 millions de personnes, soit la moitié de la population, ont été déracinées ; plus de 100 000 personnes ont été tuées, dont une grande part de civils ; sans compter les viols, les destructions massives de biens civils, et les nombreuses violations du droit international humanitaire.

A la fin du conflit, le CICR est à la recherche de plus de 22 400 personnes portées disparues. L’institution s’attachera durant les décennies qui suivent à élucider leur sort et à apporter des réponses à leur famille. Il reste encore aujourd’hui plus de 7 600 personnes portées disparues.

L’action du CICR en Bosnie-Herzégovine pendant la guerre :

  • visites de plus de 54,000 détenus dans 520 lieux de détention
  • échange de plus de 18 millions de messages Croix-Rouge
  • réunifications de plus de 4 500 familles
  • distribution de plus de 100 000 tonnes de nourriture
  • soutien fourni à plus de 1 000 hôpitaux avec de l’assistance médicale d’urgence
  • formation de milliers de combattants en droit international humanitaire