Nous débutons ici une série d’articles sur l’expression artistique en détention. Un deuxième volet suivra.
Dès 1940, des millions de soldats des armées alliées sont capturés par les troupes allemandes et transférés dans des camps de prisonniers de guerre sur le territoire du Troisième Reich. Certains prisonniers vont passer près de 5 ans en détention. Dès lors, la vie s’organise dans les camps et les loisirs se développent avec les moyens à disposition et le secours d’organisations telles que le CICR.
Ainsi, pendant toute la durée de la guerre, le Service des secours intellectuels du CICR fourni environ un million et demi d’ouvrages aux prisonniers de guerre, livres et revues, mais aussi manuels pour artistes, instruments et partitions de musique. Lors des visites des camps, les délégués relaient les demandes des prisonniers. Dans le document 2, les prisonniers du Stalag XB de Sandbostel demandent des instruments de musique et des accessoires de théâtre.
Les autorités allemandes ont tout intérêt à encourager les activités artistiques qui distraient les prisonniers et donnent une bonne image des camps. Le Stalag VIIIC sera ainsi utilisé comme camp modèle par la propagande allemande Des images tournées dans le camp lors des activités théâtrales ou sportives serviront à la base d’un film de propagande diffusé en France et intitulé « Prisonniers ».
Ces activités dépendent entièrement du bon vouloir des autorités du camp. Certains théâtres ou bibliothèques sont fermés suite à des évasions de prisonniers. Selon un rapport de visite du 17.11.1941, le théâtre de Sandbostel a été fermé à cause du danger que représente la possession de vêtements civils et d’habits féminins en vue d’une évasion.
Pour les artistes prisonniers, plus que la faim, le dur labeur ou la promiscuité, c’est le manque d’espace laissé à l’expression artistique qui est le plus difficile. Dixit Émile Goué, compositeur, prisonnier à l’Oflag XB durant 5 ans: « Le plus dur, ce n’est pas d’avoir faim ; c’est de sentir son niveau spirituel s’abaisser ».
Pour combler ce manque, une intense activité artistique voit le jour : cercles de poésie, ateliers de peinture, orchestres, troupes de théâtre, journaux, etc.
Au Stalag XIID (où Jean-Paul Sartre est détenu), un programme de théâtre est présenté par Pierre Boileau, également écrivain (auteur de romans policiers sous le nom Boileau-Narcejac après la guerre).
Ces artistes vont parfois être les instigateurs d’un essor artistique sans précédent, comme au Stalag VIIIC avec la troupe de théâtre et l’orchestre des Fol’s Sags (Les Folies Saganaises). Le 3 décembre 1940, lors d’une visite au Stalag VIIIC, les délégués du CICR remarquent « l’extraordinaire essor du mouvement artistique de ce Stalag » et prennent des photographies du cirque et de l’orchestre de jazz.
Voici quelques figures emblématiques du mouvement artistique au Stalag VIIIC.
Le prisonnier de guerre tenant les rôles féminins au théâtre se nomme Gaston Joly et est un acteur professionnel.
Le compositeur à l’œuvre dans l’orchestre et les numéros de théâtre est René Beaux. C’est lui qui va composer « La Saganaise » (sur des paroles de René Martin), véritable hymne d’espérance des prisonniers du Stalag VIIIC, jouée au début de chaque représentation. Après la guerre, René Beaux continuera sa carrière de compositeur et sera le créateur de nombreuses mélodies, notamment « La Môme Rustine », en 1955, interprété par Bourvil (le parolier étant René Ono, alias Patoum, musicien rencontré au stalag VIIIC).
Le metteur en scène à l’œuvre au théâtre du Stalag VIIIC, Jean de Lébriges (alias Jean Vicherat) est également le directeur général du journal « Le Soleil Saganais », qui fait écho aux activités artistiques du camp.
Bonjour,
mon arrière-grand-père, Auguste Jeune, était interné au Stalag VIII C, aussi votre article est vraiment intéressant et instructif pour moi. Vous évoquez également un film, « Prisonniers », savez-vous où je pourrais le retrouver? Mon AGP ayant participé à certaines pièces, j’ai l’espoir de peut être pouvoir le voir sur ces images.
Tess Le Gloanec
Bonjour,
Merci pour votre commentaire positif sur l’article. Malheureusement, je n’ai pas trouvé d’informations sur le lieu de conservation de ce film. Je vous conseille de vous addresser à l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) ou éventuellement aux Archives audiovisuelles de la Défense : http://archives.ecpad.fr/
Marie Allemann
Bonjour
La seule copie existante du film PRISONNIERS a été restaurée et est conservée au CNC-AFF à Bois d’Arcy où nous l’avons vue.
Il est parait-il visionable aussi à la BNF François Mitterand, mais il faut être abonné.
C’est évidemment un film de propagande à ne pas prendre au 1er degré mais le stalag VIII C est présent sur une grande durée : environ le quart du film (inauguration du stade, et le gala de la chanson française entre autres)
Nous en parlons sur notre site : http://sagan.webou.net/index.html
Par l’intermédiaire du site vous pourrez nous contacter pour plus d’information
Agnès et Georges ELIAS
Bonjour,
Merci beaucoup pour ces compléments d’informations.
Meilleures salutations,
Marie Allemann
Bonjour
si vous voulez tout savoir sur les spectacles du théâtre au VIII C, je peux vous envoyer toutes les photos avec tous les noms des artistes. Certaines de ces photos sont en couleurs, notamment celles ci-dessus des musiciens et du spectacle de cirque.
Un album complet sur ce stalag est en exemplaire unique au Muzeum de Zagan en Pologne.
L’album sur Sagan comporte 170 pages
Ecrivez moi à : jbr.bourbon@gmail.com
je pourrais vous envoyer cet album au format pdf
Cordialement
Bonjour
je viens de lire vos recherches.
Je suis en possessions de plusieurs photos du Stalag VD à Dortmund, où mon père a été prisonnier pendant toute la durée de la guerre.
Si vous êtes intéréssé faites le moi savoir je peux vous envoyer des scans.
Cordialement
Pascal Louvier