« Un jeune caporal d’une vingtaine d’années, à la figure douce et expressive, nommé Claudius Mazuet, a reçu une balle dans le flanc gauche, son état ne laisse plus d’espoir, et il le comprend lui-même, aussi après que je l’ai aidé à boire il me remercie, et les larmes aux yeux il ajoute : « Ah ! Monsieur, si vous pouviez écrire à mon père, qu’il console ma mère ! » Je pris l’adresse de ses parents, et peu d’instants après il avait cessé de vivre. Les parents, qui demeuraient à Lyon et dont ce jeune homme, engagé comme volontaire, était le fils unique, n’ont eu d’autres nouvelles de leur enfant que celles que je leur ai données : il aura été, comme tant d’autres, porté « disparu ». Henri Dunant in Un souvenir de Solferino (1862).

Ainsi le fondateur du CICR fut le premier porteur de Message Croix-Rouge (MCR) alors même que l’institution n’existait pas encore !

Après la bataille de Solférino, celle de Sedan.

La déculotté française de Sedan en 1870 où la quasi-totalité de l’armée ainsi que l’empereur Napoléon III se retrouvent prisonniers des Prussiens voit les prémices d’une organisation Croix-Rouge de distribution de messages à caractère familial, histoire de rétablir le lien entre les soldats capturés et leur famille.

Les 7 millions de prisonniers de guerre de 1914-1918

Mais c’est surtout à partir de 1914, avec l’Agence internationale des prisonniers de guerre créée par le CICR à Genève que se met en branle la formidable machine destinée à donner des nouvelles aux familles sur le sort de leur proche blessé, détenu et tenter d’élucider les cas des portés disparus. Ceci s’intègre dans la gigantesque logistique des colis familiaux gérés par les différentes sociétés nationales de Croix-Rouge.

Cent ans après, les MCR continuent de circuler

Aujourd’hui encore, partout sur la planète les fameux Messages Croix-Rouge circulent ; ici pour permettre à des détenus d’avoir des nouvelles de l’extérieur (nouvelles à caractère strictement familial, car chaque message passe à la censure des autorités carcérales) ; là entre membres d’une même famille dans l’impossibilité de se retrouver car séparés par une ligne de front.

1999 : Khartoum – Soudan Photo : P. Spoeri

Le verso du message est proposé à l’émetteur, le recto au récepteur. Entre les deux le CICR faisant le facteur, la navette.

Bon an mal an, le CICR, souvent soutenu dans cette tâche par les sociétés nationales de Croix-Rouge et de Croissant-Rouge gère environ 300 000 messages papier. En 2018, par exemple, il a collecté 147 488 MCR et distribué 137 210 autres. En détention, l’une de ses missions exclusives confiées par le droit international humanitaire,  Il a collecté 29 574 et distribué 13 499 réponses. Le MCR est souvent pour les détenus le seul lien, ténu, avec le monde extérieur.

En savoir plus sur le rétablissement des liens familiaux

La technologie à la rescousse du maintien du lien familial

Si la distribution des MCR reste relativement stable, le boom technologique de la téléphonie a vu l’apparition d’un nouveau type de message : les Salamat. Offrir quelques minutes de conversations pour remplacer la rédaction des messages. En 2017, le CICR affichait environ 500 000 Salamat, l’année suivante, 1 million.

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Légende de la photo de Une : Cambodge / Thaïlande 1989 : Chhouk, province de Kampot. Un homme lisant un message Croix-Rouge reçu de sa belle-soeur se trouvant au camp de réfugiés Site 2. Photo : CICR – Sylvie Leget